La formation bancaire en Afrique francophonne

La formation bancaire et financière en Afrique

Mondialisation, réglementation internationale, changement des mentalités et des besoins de la clientèle, évolutions technologiques, … tant de défis pour l’exercice des métiers de la banque et de la finance. Les banques africaines ont dû baser leurs stratégies sur une recherche permanente de l’efficacité de leurs procédures et sur la révision de leurs méthodes de travail, ce qui a nécessité, entre autres, une formation ciblée et fortement adaptée aux besoins.....

Mondialisation, réglementation internationale, changement des mentalités et des besoins de la clientèle, évolutions technologiques, … tant de défis pour l’exercice des métiers de la banque et de la finance. Les banques africaines ont dû baser leurs stratégies sur une recherche permanente de l’efficacité de leurs procédures et sur la révision de leurs méthodes de travail, ce qui a nécessité, entre autres, une formation ciblée et fortement adaptée aux besoins.

Où en est la formation dans le domaine bancaire et financier en Afrique ?

A quels enjeux et défis sont confrontées les banques africaines en matière de formation de leurs ressources humaines ?

1 Le rôle et l’importance de la formation dans l’organisation ou la banque

La formation, souvent perçue comme source de dépense, revêt aujourd’hui une importance stratégique majeure pour le développement et la performance des entreprises et plus encore plus pour le secteur financier, vu son rôle majeur dans le financement de l’économie et le caractère très réglementé des banques qui doivent se doter en permanence de ressources humaines bien formées et compétentes.

L’importance de la formation a vite été comprise par les Etats africains : les banques et institutions financières, les universités et écoles de gestion en Afrique offrent maintenant des programmes spécialisés en banque et en finance, les banques se dotant de centres de formation. Ce phénomène a été amplifié par le développement des marchés boursiers et des institutions de micro finance (IMF) sur le continent.

Le caractère dégradable des compétences rend incontournable la formation : la compétence acquise à un moment donné s’érode avec le temps et les métiers tributaires des changements techniques et réglementaires sont exposés à une dégradation rapide.

Algérie

« Dans le secteur bancaire algérien, près d’un travailleur sur deux est en formation chaque année. »
Les besoins du secteur sont considérables, en nouveaux cadres, mais aussi en requalification du personnel en activité et de recyclage dans les nouveaux métiers de la banque. Les systèmes de formation interne des banques atteignent sans doute leurs limites en matière de collecte des besoins de formation. Un meilleur repérage des besoins de formation supposerait l’existence d’un référentiel des compétences qui n’existent pas encore. En 2007 plus de la moitié des diplômés sont partis à l’étranger en vue de « compléter » leur formation

Cette obsolescence plus ou moins rapide des compétences impacte fortement les banques. Chaque réforme implique de nouveaux besoins de formation, et ces dernières années, entre Bâle, blanchiment, RTGS ou IFRS, le monde de la banque est bien servi.

La qualité des services est perçue comme un avantage compétitif et la formation concerne l’ensemble du personnel et nécessite l’engagement et le soutien de la haute direction.

Bien évidemment, la formation doit être adaptée aux réalités africaines et répondre aux besoins de compétence des entreprises africaines.

Maroc

Les banques marocaines font face à une pénurie de main d’œuvre formée. Le développement rapide du réseau bancaire marocain induit une forte tension sur le marché de l’emploi. Les compétences sont rares et volatiles. Le recruteur est parfois contraint d’accepter certaines conditions dictées par les nouvelles recrues qui sont courtisées de toutes parts. Pour faire face à cette pénurie quantitative et qualitative, se doter de structures de formation aptes à relever ces défis de l’adéquation poste/profil en quantités suffisantes devient incontournable : centre de formation, académie, université interne.

2 La formation bancaire et financière en Afrique

On peut classer les institutions de formation bancaire et financière en Afrique en quatre catégories : les Universités et écoles de commerce, les Centres de formation des banques (commerciales et centrales), les centres ou activités de formation des organismes internationaux et de coopération, et les instituts ou écoles privées.

1 Universités et écoles de commerce

Certaines universités et écoles de commerce offrent des formations bancaires et financières et proposent des cursus diplômant menant à l’obtention du BTS, de la Licence professionnelle, du Diplôme d’études supérieur spécialisé (DESS) ou du Mastère en banque et finance. Les banques offrent parfois à ces diplômés une formation complémentaire (le fameux « tour de banque ») pour les adapter à leurs besoins propres et leur inculquer une culture d’entreprise. Certains établissements nouent des partenariats avec la profession bancaire (partenariat CESAG / Groupe Ecobank Transnational Inorporated (ETI).

  • Le Centre africain d’études supérieures en gestion CESAG

Le CESAG, école régionale des pays de l’Union économique et monétaire ouest africaine, accueille des stagiaires des pays de l’Afrique occidentale et centrale francophones et anglophones. Il propose depuis 2001 un Mastère en banque et finance et les étudiants bénéficient d’un enseignement pratique, en salle de marché-école. .

2 Centres de formation professionnelle des banques commerciales et centrales

  • Les activités de formation des banques commerciales

Les banques mutualisent souvent la formation par leurs associations professionnelles (Centre de formation bancaire au Togo, Groupement professionnel des banques au Maroc), répondant ainsi aux aspects et besoins communs de formation de la profession.

Compte tenu de ses propres besoins, chaque banque mène ses actions spécifiques et certaines banques disposent à l’interne d’une structure de formation répondant à un besoin de formation qualifiante (exemple de BBS Bgfi Business Scool).

Les maisons mères des filiales des banques françaises (Banque nationale de Paris, Société générale) soutiennent les actions de formation de leurs filiales africaines.

  • Le CFPB

Longtemps incontournable, le Centre de formation de la profession bancaire (CFPB) offre des programmes de formation diplômant délocalisée dans les pays africains francophones (Maghreb et Afrique noire francophone) et propose des formations dans la plupart des métiers de la banque, de la formation de base à l'expertise. Il organise également des séminaires sur les grandes problématiques bancaires (blanchiment, sécurité).

Compatibles avec la poursuite d'une activité professionnelle, l'organisation des cours permet la préparation à l’obtention de trois diplômes : le Brevet bancaire, le Brevet professionnel banque et le Diplôme de l'Institut Technique de Banque (ITB).

  • L’Institut Technique de Banque (ITB)

La formation de l’ITB débouche sur un diplôme de l'enseignement supérieur, délivré par le Conservatoire national des arts et métiers (CNAM). Son accès est ouvert, sans condition d'âge, à tout étudiant, qu'il appartienne ou non à la profession bancaire.

  • Les Banques Centrales et la formation bancaire

Les banques centrales développent des activités de formation pour leur personnel et celui des banques et établissements financiers.

- La Banque Centrale d’Algérie (École supérieure de banque) forme le personnel de l’ensemble du secteur bancaire. La Banque du Ghana organise des séminaires à l’intention du personnel des établissements bancaires du pays.

- La Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) a créé le Centre ouest africain de formation et d'études bancaires (COFEB) qui offre des formations diplômantes et qualifiantes à Dakar.

- La Banque Centrale du Congo (RDC) organise pour l’ensemble du secteur bancaire de RDC des formations IFRS.

- La CEMAC, en Afrique Centrale, s’est dotée d'un centre de formation.

Tunisie :

Le gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie a appelé les banques tunisiennes à « mettre des écoles dans leurs moteurs ».

Ces dernières années, de nombreuses banques ont opté pour des programmes de coopération avec des universités, mettant en place de formations diplômantes (mastère spécialisé « banque et marchés financiers »,à la Faculté des sciences économiques de Tunis, master professionnel « finances d’entreprises et des marchés » à l’Institut des hautes études commerciales de Carthage (IHEC).

Le Centre Professionnel de Formation Bancaire Tunisien (CPFB) propose des formations diplômantes en partenariat avec l’Institut technique de banque français (ITB) et l’Université de Cergy Pontoise.

Les banques se trouvent face à de nouveaux défis liés à la volatilité des compétences formées au prix fort. « Le plus dur pour nous n’est pas désormais de former de nouveaux talents, mais de retenir nos collaborateurs tentés par les chants des sirènes ».


3 Organismes de financement, de coopération ou d’appui à la formation bancaire

  • Le Centre d’études financières économiques et bancaires (CEFEB) de l’Agence française de développement (AFD) réalise des formations à Marseille ou dans les pays africains, sous forme de formation diplômante et de séminaires en banque.
  • L'Institut Bancaire et Financier International (IBFI) est un des acteurs de la coopération de la Banque de France avec les Banques Centrales étrangères à travers les actions de formation.
  • L’Institut de la Banque mondiale (WBI) et la Société financière internationale (SFI)

WBI intervient sur le continent par des ateliers et des séminaires de formation par visio-conférences, en présidentiel ou en ligne. Ses formations à la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme occupent une place importante dans ses activités.

Les formations qualifiantes de SFI en Afrique contribuent au renforcement des capacités des institutions bancaires et organismes de microfinance. SFI participe à l’établissement de centres de formation bancaire dans les pays africains. Son réseau mondial des écoles de gestion (Global Business School Network, GBSN) met en place des projet-pilotes pour renforcer les capacités des écoles de commerce d’Afrique subsaharienne, qui offrent, entre autres, des programmes en banque et en finance.

  • La Fondation pour le renforcement des capacités en Afrique (Africa Capacity Building Foundation, ACBF) intervient aussi dans le financement des actions de formation bancaire et financière dans tous les pays d’Afrique. L’ACBF finance des écoles ou des programmes régionaux de formation diplômante (l’Institut d’économie et de finance au Gabon, le Mastère en banque et finance du CESAG au Sénégal, etc.). L’ACBF finance des projets de formation qualifiante mis en œuvre par des institutions sous régionales (l’Institut ouest africain de gestion économique et financière –WAEFM-, l’Institut de gestion macroéconomique et financière (MEFMI), la BCEAO, la Banque des États de l’Afrique centrale, etc).

4 Les instituts ou écoles privées

Jusqu’à la fin des années 2000 peu d’écoles ou institut privés de formation ont pu exercer une influence notable dans la formation du secteur bancaire africain francophone. Pendant longtemps un monopole de fait s’est établi au profit de Finances Sans Frontières (FSF).

Crée à la fin des années 90, FSF a bénéficié de l’appui du Club des Dirigeants des Banques Africaines, et ce d’autant plus naturellement que le Directeur Général de FSF était le Secrétaire Exécutif du Club.

Les moyens de communications étant limités à cette époque (Internet n’existait pas en Afrique et seul le courrier où le fax permettait de communiquer), bénéficiant du relai de communication du Club, FSF avait un avantage concurrentiel certain sur ses éventuels concurrents : bon nombre de banques africaines ne recevaient que le catalogue de formation de FSF. Toute concurrence d’un autre institut de formation était quasiment vouée à l’échec.

FSF a su proposer une très large une gamme de formations adaptées à la banque africaine, sur le marketing et le commercial, la gestion des ressources humaines, les opérations bancaires, le juridique, le droit OHADA, etc. FSF était probablement la seule société privée non institutionnelle à proposer des séminaires interbancaire à la profession.

Un partenariat avec Finabanque (société française) lui a apporté une gamme de formations complémentaires sur les domaines pointus tels la comptabilité bancaire, le contrôle de gestion, les risques, le contrôle interne et l’audit, Bâle et les IFRS.

Par la suite, à partir des années 2010, grâce au développement d’Internet, d’autres sociétés de formations ont pu se faire connaître et percer le milieu bancaire africain.

Des sociétés très performantes comme par exemple Ambre Associate (Madagascar) ou Impact Conseil (Togo) ont pu pénétrer le marché africain de formation bancaire ou micro finance. Finabanque International a noué des alliances pour proposer des séminaires interbancaires en pays de la zone franc et à Madagascar.

Le Réseau d’intelligence bancaire (RIB) s’est créée à Abidjan RIB proposant également une large gamme de séminaires interbancaires, ou encore AIRE (également à Abidjan) qui a pu percer dans les domaines de gestion des ressources humaines. En RDC nous assistons à l’émergence de sociétés telles CEFOPERCO ou encore Y-Box.

3. Défis et perspectives de la formation bancaire et financière en Afrique

Ces enjeux et défis sont liés aux mutations du secteur bancaire et financier au regard des besoins de la clientèle, de l’émergence des marchés financiers et des changements de l’environnement technologique et réglementaire.

  • Les besoins et exigences de la clientèle et du marché

La pression des exigences de la clientèle et de la concurrence, l’émergence des marchés financiers sur le continent bouleversent le métier de la banque et créent des besoins nouveaux de formation conduisant les banques à former leur personnel ou recruter des professionnels diplômés en finance pour pouvoir intervenir sur ces marchés.

  • Les nouvelles technologies et les besoins de formation bancaire

La banque doit adapter ses pratiques et systèmes suite à l’irruption des nouvelles technologies. La formation permet de répondre à ces exigences (exemple de l’introduction de la monétique). Les nouvelles technologies ont également modifié la pédagogie de la formation (formation à distance, e-learning).

  • Les contraintes réglementaires et la formation

Les banques sont soumises à une réglementation particulière par les autorités monétaires. Les nouvelles exigences de Bâle, de la législation contre le blanchiment, de la nouvelle culture de risque, des IFRS imposent aux banques africaines de développer des compétences en matière de contrôle, d’audit, ou d’analyse financière. Certains règlementations rendent même obligatoire une formation du personnel.

4. Conclusion

Les banques africaines sont contraintes de mettre en œuvre des programmes de formation efficaces. La concurrence s’est ouverte et il existe maintenant en Afrique francophone de très nombreuses écoles, centres de formation, institutions d’appui à la formation dans le domaine bancaire et financier.

La création par les banques de centres de formation régionale et le soutien qu’elles pourraient apporter au développement des écoles ou centres de formation régionaux sont des solutions à développer, tout comme un cadre de coopération et d’alliances entre les banques africaines et les écoles de gestion.